Présentation des différentes musiques péruviennes
Musique des champs
Cet art musical veut maîtriser le souffle du cycle de la terre et de la vie, animé au son des flûtes orchestrées et contrôle le déroulement du temps aux pas de la danse et au rythme des tambours.
La logique musicale repose sur la complémentarité et la réciprocité.
Dans les campagnes et dans les communautés aymara et quechua la musique, essentiellement rituelle, est étroitement liée aux cycles agraires et aux saisons. Les lois qui la régissent sont très anciennes. Dans son interprétation orchestrale notamment, elle reflète souvent l’organisation sociale et la division de l’espace communautaire en deux éléments principaux.
A la campagne, chacun de ces orchestres de flûtes n’est accordé qu’à lui-même et constitue ainsi une entité propre. Ces sortes de cartes d’identité sonores permettent aux communautés de se différencier les unes des autres.
La flûte de pan
A l’époque précolombienne, le jeu des deux musiciens existait déjà; il est clairement représenté sur les sculptures de l’époque mochica. Manifestement les tuyaux les plus longs (parties les plus graves) sont situés à la droite du musicien. Cette orientation n’est pas gratuite, elle est rattachée à la prédominance de la droite comme orientation indiquant la force et le départ de toutes choses. La droite s’assimile au côté bénéfique et a une connotation masculine. Les sons graves sont à l’origine de tous les autres. Or le son grave est primordial dans la technique du jeu des flûtes de pan. Chaque fois que l’on trouve une représentation où les musiciens jouent en plaçant les graves à gauches, il s’agit d’un rite d’inversion et d’un être surnaturel ou de la représentation d’un mort.
Une musique rituelle
Dans la majeure partie des communautés quechua et aymara de l’Altiplano, la musique rythme la vie quotidienne et certaines mélodies instrumentales semblent proches des anciens airs précolombiens. Tout comme à l’époque des grands horizons andins, les musiques sont interprétées par des orchestres d’instruments à vent et à percussion. Ils sont constitué de flûtes de pan, de kena, et depuis la conquête espagnole de flûtes à bec et parfois d’instruments à cordes, qui ne sont toutefois jamais mêlés aux instruments à vents dont l’utilisation est étroitement codifiée. Ainsi, les flûtes de pan sont traditionnellement utilisées à l’époque des récoltes d’avril à juin. A l’occasion des fêtes du mois d’août, on emploie aussi les kenas pour remercier la terre et clore le cycle des festivités. Après un silence correspondant au repos de la terre et aux semailles, le cycle instrumental recommence en février avec l’utilisation du pinkillu (flûte à bec).
L’orchestre expression vivante de la vie communautaire
A travers la disposition spatiale des musiciens au sein de l’orchestre, nous pouvons démontrer qu’il s’agit d’une forme de reproduction du modèle social dualiste et hiérarchisé. Chaque élément d’une paire est réparti entre deux musiciens, comme à l’époque préhispannique, l’un sera « ira » celui qui guide, l’autre « arca » celui qui suit ou qui répond. La moitié « ira » est toujours la plus petite de la paire et c’est elle qui commence. Quand on joue en groupe, le premier est donc « Mama ira » immédiatement suivit de « Mama arca », puis « maltona ira », suivi de « maltona arca », « liku ira », « liku arca », « oca ira », « oca arca ». Lorsque le groupe se déplace ou danse, il commencera toujours par se déplacer ou tourner dans le sens des aiguilles d’une montre. L’orientation de base est donc la droite, elle suit la course du soleil, et se retrouve dans la position de l’instrument grave, à droite. Il arrive que le groupe tourne dans l’autre sens mais exclusivement pour se reposer ou changer de mélodie (autrement dit « ne pas jouer »). Le jeu du registre le plus grave, ou mama est confié aux plus expérimentés et aux plus résistants le registre le plus aigu oca à des personnes âgées. C’est ce registre, le plus aigu, que l’on entend le plus loin et il sert de référence aux autres musiciens « pour ne pas perdre la mélodie ». Les tailles intermédiaires constituent le corps de l’orchestre, encadré par les extrêmes qui « mettent en place la mélodie ». On notera cependant que les joueurs de percussion qui accompagnent les orchestres de flûtes de pan sont en principe, dans les registres intermédiaires. Généralement au nombre de quatre, ils donnent le signal de départ et de fin des mélodies.
L’orchestre représente à lui seul l’ensemble de la communauté et matérialise son expression la plus sacrée par le souffle, force qui l’anime. Que recherche la communauté à travers sa musique ? Ce souffle collectif est sa voix et elle ne prend corps que par l’addition de ses composantes, dont l’archétype et les éléments ont été confectionnés par le maestro. Cet homme taille les flûtes la nuit tombée lorsqu’il n’y a pas de bruit « pas même celui des oiseaux ». Sa tâche n’est pas révélée aux étrangers, il détient la voix de sa communauté, et détermine le son de référence permettant d’accorder l’ensemble des autres instruments.
La superposition de l’ensemble des registres et la mise en oeuvre de tous les éléments qui les composent contribuent à la relance énergétique de la communauté et à satisfaire la Terre mère.
D’après un texte de Xavier Bellenger
La musique des villes
La musique andine urbaine n’a que peu de rapports avec celle pratiquée dans les communautés agraires. La musique « urbaine » est née dans les villes comme La Paz, dans les années 60. Elle est le fruit d’une génération de musiciens, étudiants ou créateurs, à la recherche d’une nouvelle expression. Elle utilise un nouveau mélange instrumental : flûtes et cordes, inusité dans le campo. Leurs sonorités plus accessibles à l’oreille occidentale leur ont ménagé une large audience en occident. Elle a acquis sa vitalité propre et continue d’évoluer, et à engendrer sans cesse de nouveaux styles, comme l’intégration d’instruments électriques.
Pour mieux connaître les instruments de musiques nous vous invitons à suivre le lien suivant.